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C'est que le Mois de la Photo cette année n'a pas fait les choses à moitié pour combler les amoureux de l'objectif et autres fous de papier glacé, de plus en plus nombreux et de plus en plus avides de découvertes et de coups de foudre photographiques. Le copieux menu 2014 se divise en trois temps : « Photographie méditerranéenne », « Anonymes et amateurs célèbres » (d'où Michel et son atterrissage programmé) et « Au cœur de l'intime ».
Côté Méditerranée, oubliez la crème soleil et vos photos de vacances mal cadrées. Vous vous êtes crus à Saint-Tropez ? Ici la mer n'est pas tranquille et les photographes l'ont bien compris. Garcia-Alix y voit un Faux horizon et fait planer un corbeau noir comme la mort à la Maison Européenne de la Photographie. Zachman, Hanes et consorts dénoncent l'injustice des traversées : du sud au nord avec enfants, bagages et faux espoirs, et du nord au sud pour des touristes toujours plus gras et luisants sous un soleil de plomb. Je suis pas mort, je suis là crie Laetitia Tura, porte-voix (ou porte-image ?) de ces migrants que l'on n'entend pas.
Côté anonymes et célébrité, on est un peu plus légers ! On a déjà parlé de « l'écrivain célèbre » qui permettra sans doute aux rats de bibliothèque de se mettre à la photo pour l'occasion (on raconte qu'ils campent déjà rue de Ménilmontant...). Mais il y aura aussi tout ceux que l'on ne connaît pas : les fondateurs du photojournalisme à l'Institut hongrois, les Delton et leur collection ahurissante d'un autre siècle au musée de la Chasse ou encore les "photographieurs" de nuages à la galerie Robespierre pour Cloud Atlas (hommage au film éponyme).
Côté intimité, Jean-Louis Pinte, délégué artistique du Mois de la photo, nous murmure les mots d'ordre : « L'intime est là derrière l'image ». Et c'est pourtant vrai qu'il s'en cache des choses derrière ces photographies mondialement connues mais aussi plus confidentielles. Quel plaisir d'avoir à redécouvrir les dessous de l'Amérique grâce à Winogrand ou Eggleston. Quel bonheur aussi de rencontrer de nouveau Jane Evelyn Atwood qui sait convoquer l'intime avec sensibilité et pudeur... Mais la photographie saura aussi se montrer totalement impudique, déshabiller les corps, un par un, coller à l'épiderme de modèles mis à nu. Après le musée d'Orsay, le corps masculin sera mis à l'honneur par Koppitz, Lachapelle ou Warhol à la galerie Guiraud, tandis que Marianne Rosenthiel fera débarquer de petits soldats anglais sur les fesses d'une jeune femme. A suivre. De près !
Un mois entier pour tout découvrir. Arpenter les musées, centres culturels et galeries privées. Est-ce seulement possible ? Il vous faudra faire preuve de courage et d'abnégation. Il ne sera pas non plus superflu de chausser vos plus belles baskets. Pensez aux boules Quiès aussi car vous ne serez pas à l'abri des commentaires fumants de critiques parisiens sous acide : « Pas mal ce métalangage au niveau de la transposition émotionno-intellectuelle du ressenti de l'artiste... ».
Enfin bref, on vous fait confiance, et l'on vous souhaite un merveilleux Mois de la Photo, avec ou sans Michel Houellebecq !
Emilie Lemoine